« Les personnes en bonne santé sont mauvaises pour le capitalisme »

Tout commence l’été passé, où j’ai la chance de visiter une exposition temporaire sur le progrès technologique au musée d’art appliqué de Vienne (mak.at). Sur un mur, plusieurs phrases interpellent le visiteur. Plus intéressantes les une que les autres, l’une d’elles a particulièrement retenu mon attention:

mak.at exhibition 2017
« Healthy people are bad for capitalism », « les personnes en bonne santé sont mauvaises pour le capitalisme ». Fond violet, au centre. N’hésitez pas à jeter aussi un oeil aux autres si vous lisez l’anglais.

Les personnes en bonne santé sont mauvaises pour le capitalisme! Vraiment? Comment ça? Après réflexion, j’ai trouvé l’explication suivante: Vous admettrez que lorsqu’on est malade on achète le plus souvent des médicaments, ou l’on consulte son médecin. Ou mieux encore, lorsqu’on doit être hospitalisé, ce sont alors tout un tas de personnel, d’infrastructures, d’équipements et de médicaments qui sont mis à contribution pour vous soigner. Tout ceci est rémunéré, amorti ou acheté, et fait donc évidemment tourner l’économie. Il semble donc évident que l’industrie pharmaceutique, les fournisseurs d’équipements médicaux et le personnel médical ont alors plus ou moins intérêt à ce que vous soyez en mauvaise santé s’ils veulent gagner de l’argent. Alors bien sûr, aucune de ces personnes ne vous fera tomber malade juste pour vous vendre des médicaments ou vous soigner. Bien sûr.

Santé et intérêt capitaliste sont contradictoires

Reste que c’est assez vicieux, et l’on se rend vite compte que santé et intérêt capitaliste sont dans ce cas en réelle contradiction. A partir de quand un traitement plus ou moins efficace sera prescrit d’office? « A voir », dira le médecin. « TOUJOURS, par principe de précaution » diront les dirigeants de Novartis ou Bayer, qui useront alors de nombreux moyens pour faire pression dans ce sens. Et s’il y a des effets secondaires…??? En tout cas, heureusement qu’il existe les antidépresseurs. C’est tellement plus simple et plus rentable de vendre un palliatif plutôt que de rechercher les causes réelles de la dépression (qui a dit manque de Sens?). Et ne parlons pas de l’usage intensif des antibiotique sur le bétail, des maux de tête, ni des vaccins obligatoires toujours plus nombreux. Il est d’après moi simplement intéressant de remarquer que nous vivons dans une société dont la santé économique prendrait un sacré coup si nous étions en meilleure santé physique. Santé économique ou physique, il faut choisir. Nous faisons face à deux intérêts diamétralement opposés. A méditer.

Bonheur ou capitalisme?

Ayant rapidement posé la problématique de la santé, passons directement au capital suprême: le bonheur! Depuis que j’ai ajouté du Sens à ma vie, je consomme beaucoup moins. J’imagine que je n’ai plus besoin d’essayer vainement de compenser ce manque de Sens par les plaisirs éphémères de l’achat. Ni de me valoriser par une belle voiture, une montre de luxe ou un smartphone dernier cri. D’ailleurs, j’ai économisé tellement d’argent que j’ai pu baisser mon temps de travail. En plus, j’expérimente chaque jour les bienfaits du minimalisme, et comme certaines de mes valeurs concernent le respect de la planète et la durabilité, j’ai aussi choisi de limiter mes déplacements. Maximum 1 vol long courrier tous les 5 ans par exemple. Finalement, le parc à côté de chez moi n’est pas tellement moins bien qu’une plage à Bali, une fois qu’on s’est libéré du conditionnement publicitaire et que notre vie à la maison n’est plus synonyme de stress et de malheur. Bref, je suis devenu un véritable cancre pour l’économie, mais une bénédiction pour la durabilité de notre planète et donc la (sur)vie humaine. Et ça me rend tellement heureux!

Bonheur et intérêt capitaliste sont contradictoires

Alors bien sûr, personne ne ferait en sorte que vous soyez plus malheureux afin que vous consommiez plus. Bien sûr. Reste que c’est assez vicieux, et l’on se rend vite compte que bonheur et intérêt capitaliste sont dans ce cas encore en réelle contradiction. On pourrait imaginer qu’une marque de maquillage vous dise que vous êtes moche pour vous vendre ses produits (voir les débuts de L’Oréal). Ou que l’on commence à prétende que ceux qui ne possèdent pas une montre de luxe ont raté leur vie. Ou encore que l’on dissimule la recette du bonheur, afin qu’un maximum de personnes continue de tenter de combler le manque de Sens de leur vie en achetant toujours plus de plaisirs.

Il est d’après moi à nouveau intéressant de remarquer que nous vivons dans une société dont la santé économique prendrait un sacré coup si nous étions plus heureux. Santé économique ou bonheur, il faut choisir. Nous faisons à nouveau face à deux intérêts diamétralement opposés.

Capitalism solution
Une autre image vue au mak, la Cankun Factory à Xiamen City, en Chine. Vous avez dit heureux?

Changer la société, tôt ou tard

Si nous voulons réellement être heureux, il faudra donc adapter notre modèle de société, tôt ou tard. Espérons seulement que ce sera avant que notre survie soit elle-même mise en jeu… En attendant, vous pouvez toujours participer à sauver le monde et pourquoi pas coller une affiche afin d’accélérer les choses ! 🙂

Une petite affiche pour changer le monde? Cliquez pour l’ouvrir.