Le dernier smartphone, la belle voiture, la montre, les habits de marque…

Aujourd’hui nous achetons de nombreux objets de luxe, ce qui signifie qu’on ne les convoite pas pour l’utilité première qu’ils possèdent (remplir les fonctions d’un smartphone, se déplacer, savoir l’heure, se vêtir, etc.), mais pour le plaisir qu’ils nous procurent. Que ce soit à travers leur esthétique ou leur puissance, le fait qu’ils semblent démontrer que nous sommes meilleurs que ceux qui n’en possèdent pas, ou par la croyance qu’ils sont signe d’une vie « réussie » voir même heureuse, les objets de luxe nous valorisent. De plus, ils nous permettent d’enfin satisfaire la frustration créé par le conditionnement publicitaire subi depuis l’enfance, qui nous répète sans cesse « Regarde! Tout ce que tu n’as PAS! Tu serais tellement plus heureux en achetant ça! ». Mais n’est-ce pas un peu triste d’être réduit à des objets, aussi-chers soient-ils? Ne valons nous pas plus? Ne valons nous pas mieux? Et comment en est-on arrivé là?

Luxe et bonheur?
Vous enviez cette personne? Pourtant on voit bien qu’elle est en pleine « faillite suprême« !

Ce qui vaut bien plus que le luxe…

Lorsque je me suis retrouvé seul deux semaines dans mon lit suite à un accident, j’ai dû faire face à ma vie. Je me suis vu continuer près de quarante ans comme je l’avais fait jusqu’ici. Puis, à 65 ans, prendre le temps de regarder en arrière: qu’avais-je fait de la plus grande partie de ma vie? J’avais rencontré une belle femme et eu des enfants, nous habitions dans une belle maison avec tout le confort possible, j’occupais un poste important et j’avais pu acheter tout ce dont j’avais rêvé. Et là, désormais à la retraite, je regardais tout ça avec un goût amer dans la bouche: en fait, ma vie n’avait servi à rien.

Bien sûr en bon perfectionniste tout ça était excessif, donc faux. Mais dans les grandes lignes l’idée n’étais pas si mauvaise: la « réussite » capitaliste, faite d’objets et de (sur)consommation et inspirée de l’idéal américain, ça ne valait rien! Et j’avais beau retourner le problème dans tous les sens, je ne pourrais jamais être profondément fier de cette vie là. Non, quand je pensais aux personnes ayant réellement fait de belles choses, c’était plutôt de Martin Luther King ou mère Theresa (entre autres) dont il était question, et eux se fichaient pas mal du luxe. D’un autre côté, ressembler à ces personnes semblait vraiment inatteignable et le sacrifice semblait trop important, j’étais perdu. Heureusement, j’ai découvert un peu plus tard que, pour être heureux justement, il fallait un juste équilibre entre du plaisir, et… du Sens.

… le Sens!

Pensez-vous que mère Theresa ou Martin Luther King auraient eu besoin de se valoriser en achetant une montre à plusieurs dizaines de milliers d’euros ou une grosse villa avec piscine? Ou que Aung San Suu Kyi ou Gandhi auraient acheté une grosse Audi ou un sac à main à 1000€? Non, c’est évident. Car leur vies possédait suffisamment de Sens pour que le luxe leur paraisse bien superficiel et inutile, si ce n’est carrément triste et malheureux. Si nous consacrons suffisamment de notre temps à Aider les autres, Protéger l’Environnement et ceux qui y vivent, nous Engager pour un monde plus Juste, Equitable et Durable, militer pour d’avantage de Paix, de Beauté ou de Bonheur, pour le Respect de tous, aujourd’hui et dans le futur, ou tout autre chose qui corresponde à nos valeurs profondes, alors nous aurons bien plus que ce que peut nous apporter le plus cher des luxes. Nous aurons un Sens absolu à notre vie.

Blocage d'un pont par des membres d'Extinction Rébellion à Lausanne le 20 steptembre 2019.
Militer pour notre survie et bien plus encore, quoi de plus Sensé?

Des vies rendues inSensée?

Mais voilà, justement, nous n’avons pas le temps. Nous dépensons toute notre énergie à plein temps dans un travail peu porteur de Sens et nos soirées et weekends deviennent alors tout juste bons à dormir et à nous divertir. Ou plutôt à faire diversion du manque de Sens de nos vies industrielles, à nous faire oublier leur peu de valeur, et à nous reposer suffisamment pour pouvoir recommencer chaque semaine, encore et encore, jusqu’à la retraite, de manière aliénante et absurde.

Les fenêtres de ces bureaux ont beau refléter les nuages, nous aurions tord de croire que la vie des personnes qui y travaillent tend vers le 7e ciel.

Rendus malheureux par cette vie totalement déséquilibrée, nous faisons alors ce que la publicité omniprésente financée à hauteur de plusieurs milliards chaque année nous recommande de faire: pour aller mieux, il faut dé-penser. La boucle infernale des plaisirs inSensés est alors bouclée:

  • Travail à plein temps dont le salaire permet d’acheter un maximum de plaisirs (voir ci-après) et dont le produit répond au besoin de (sur)consommation.
  • Manque de Sens de ce travail et pas l’énergie de faire autre chose de plus Sensé à côté (le travail nous prend 100% de notre énergie).
  • Malheur provoqué par le déficit de Sens de cette « vie ».
  • Conditionnement publicitaire nous vendant de multiples plaisirs inSensés comme solution à notre malheur.
  • Dépense du solde de son salaire dans les plaisirs proposés correspondant à notre catégorie de consommateur.
  • Plaisir temporaire liée au nouvel achat, masquant pour quelques temps le déficit de Sens et semblant valider l’argumentaire publicitaire ainsi que la nécessité de travailler un maximum afin avoir les moyens d’acheter le plus de plaisir possible.
  • Retour à la ligne 1: Travail à plein temps dont le salaire permet d’acheter un maximum de plaisirs et dont le produit répond au besoin de (sur)consommation -> …

Pour s’en sortir il est alors nécessaire de casser cette boucle, par exemple en prenant le risque de diminuer son temps de travail afin d’utiliser une partie du temps et de l’énergie libérés pour pouvoir commencer à réfléchir à comment ajouter du Sens dans sa vie. Très vite nous n’aurons alors plus besoin de dépenser autant d’argent dans des plaisir devenus inutiles, et la baisse de salaire n’aura plus aucune importance. Mieux encore, il est bien possible que nous dépensions ensuite bien moins que le montant de la baisse de salaire et que nous vivions alors plus confortablement!

Soyons fier d’être « pauvre »!

Comme vu précédemment, nous achetons des objets de luxe avant tout pour tenter désespérément de combler le manque de Sens de nos vies. Mais tout comme on ne peut assurer une alimentation équilibrée avec des bonbons, on ne peut combler un déficit de Sens par du plaisir, aussi cher soit-il.

Vu sous cet angle, le luxe perd franchement de sa superbe: il n’est plus que le corollaire d’une vie pauvre en Sens. Alors cessons de nous en émerveiller, ce n’est pas rendre service aux personnes qui en sont victimes. Et n’oublions pas que beaucoup de plaisirs gratuits et accessibles peuvent nous apporter autant si ce n’est plus de joie que le plus cher des luxes, à commencer par réapprendre à s’émerveiller de ce qui nous entoure. Le tout combiné avec suffisamment de Sens, et nous voilà désormais bien plus heureux!

Pauvre en argent mais riche en Sens, et donc probablement plus heureux!
Manchette de journal aperçue il y a quelques années.

Et vous? Vous travaillez à 100%? Dépensez -vous beaucoup dans le luxe? Etes-vous pauvre en argent? Riche en Sens? Sinon comment allez-vous faire pour sortie de la boucle infernale des plaisirs inSensés?